samedi 8 mai 2010

Lydia, Virginie, Wendy et les autres



Il fallait être drôlement motivé pour prendre le train samedi 17 avril dernier à la gare d’Austerlitz ! Un volcan islandais crache des poussières dans le ciel européen, la grève des cheminots en pleines vacances scolaires et voilà que les quais du train menant à Bourges souvent déserts, même le week-end, se transforment en quai du RER A à l’heure de pointe. Ce qui provoque des retards interminables et une tension incroyable dans les wagons bondés. Deux mecs se tapent sur la gueule, une gamine hurle «papa, papa» à son père qui se rue sur un gars (noir) assit à sa place. Les flics débarquent, je me demande où je suis… peut-être déjà dans un bled des States où a grandit Lydia Lunch, enfin tel que je me l’imagine à travers la lecture de son dernier livre «Will Work for drugs» traduit en français et qui vient de paraître au Diable Vauvert sous le titre « Déséquilibres synthétiques ». Car c’est bien pour la diva post punck et pour ses talentueuses traductrices : Virginie Despentes et Wendy Delorme que je me déplace ce samedi-là. Le programme s’annonce passionant et la nuit… blanche.



Après un petit tour dans les ruelles du centre de Bourges, envahies par les groupes de musique, j’arrive à la friche de l’Antre-Peaux. C’est le QG d’Emmetrop, association culturelle fondée par Erik et Fred trans, militants féministes, transgressifs et audacieux que j’ai déjà eu l’occasion de présenter ici. La friche est un vrai lieu underground très ancré dans son environnement local capable d’attirer un public beaucoup plus large. Car il faut le dire, ce genre de lieu «féministe libre» «hors circuits» est assez rare en France.

Les mutantes sont déjà là. Lydia Lunch et Virginie Despentes lézardent au soleil. A quelques mètres de là, Wendy Delorme joue sa starlette en séduisant la belle Coralie Trinh Thi, les deux muses prennent des poses sous l’œil concentré de leur photographe, Lynn. Vers 19h, nous nous dirigeons vers la salle où le public, à majorité féminine, attend. Lydia et Virginie, «jumelles maléfiques», selon l’expression de la diva américaine, commencent la lecture. Leurs voix alternent des passages en américain et en français récités d’une manière théâtrale et émouvante par Lydia et repris en écho par Virginie. Elles nous entraînent dans un univers puissant et enragé exprimé par une langue brute, haletante. Lydia Lunch qui fut l’égérie du photographe fétichiste Richard Kern, écrit et chante. Son concert plus tard dans la soirée, est pour moi une révélation. Les lectures se poursuivent avec Wendy Delorme et Coralie Trinh Thi. La nuit sera longue ce samedi-là... Après quelques performances, des femmes, dont Virgine Despentes se succèdent aux platines et nous danserons jusqu'au matin.




Je comprends combien sous leur apparence apaisée, ces femmes sont des guerrières de notre temps. Elles réussissent à s’imposer en marge de ce qu’on appelle aujourd’hui le «mainstream» (les chemins balisés, convenus) par une liberté d’expression et une exhaltante fougue pour le plaisir, au sens large.

Les photos sont de Adeline Sk
de haut en bas : Wendy Delorme, Lydia Lunch et Coralie Trinh Thi, Virginie Despentes

2 commentaires:

  1. Huhu..
    Je regrette de ne pas avoir pu rester pour profiter de l'ambiance... !
    Ca ne change rien au fait que la lecture de Lydia Lunch reste un très bon souvenir :)

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  2. ...et moi, je regrette de ne pas avoir été présente la veille, à la projection du documentaire féministe de Virginie D. En tout cas, le brunch de dimanche chez Erik a complété cet hommage féminin sous toutes ses formes... En cette année d'anniversaire des 40 ans du mouvement de libération de la femme, je garderai le souvenir de ce beau we, à mon sens, militant ! Merci à Emmetrop d'occuper cet espace exceptionnel

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