samedi 27 mars 2010

Qui était Edouard Stern ?




Le 28 février 2005, le banquier Edouard Stern est assassiné dans son appartenant genevoix par sa maîtresse Cécile Brossard. On le retrouve, gisant, criblé de balles à la tête et au thorax, le corps enfermé dans une combinaison en latex couleur chair. Le procès de la meurtrière a eu lieu au mois de juin 2009. Celle-ci fut condamnée à huit ans et demi de prison. Depuis le début de ce mois de mars, elle bénéficie d’un régime de semi-détention. L’écrivain, Régis Jauffret, fut chargé de suivre le procès pour le Nouvel Observateur. Il vient de publier Sévère, un livre inspiré de cette affaire, aux éditions du Seuil.

Beaucoup d’encre à coulé depuis cinq ans autour de cette histoire ; ce n’est guère étonnant concernant une affaire de sexe sadomasochiste et de pouvoir. Il ne s’agissait pas d’un fait divers banal, puisque la victime était une personnalité du monde de la finance qui éveillait curiosité et fascination. Un livre, «Le fils du serpent – Vie et mort du banquier Stern» d’Airy Routier, paru chez Albin Michel quelques mois seulement après le meurtre, m’a été signalée à l’époque par le psychanalyste qui avait, un temps, suivit le banquier. Je connaissais et appréciais ce praticien. J’étais aussi citée dans ce livre qui tente de décortiquer la personnalité de cet homme dont la beauté, l’intelligence et la jeunesse «placent au-dessus du lot». L’auteur avance des pistes pour expliquer et pour comprendre ce qui a provoqué le drame. Les informations concernant le monde de la finance sont éclairantes et la description des moeurs propres à un certain type d’hommes de pouvoir me parut assez réaliste.

D’après cette enquête, le banquier au parcours professionnel fulgurant, a mené une vie sociale hétérosexuelle assez stéréotypée. Il a fondé une famille avec une épouse richissime dont il divorce. Ses relations féminines apparaissent comme un modèle de machisme ordinaire, le luxe et la puissance en plus. Son libertinage et sa fréquentation des «demi-mondaines» n’est pas un secret. Lorsqu’il rencontre Cécile Brossard, il semble perdre pied. Elle se met à son service pour réaliser ses fantasmes, notamment sadomasochistes, et pour recruter des complices de jeux érotiques. L’auteur n’hésite pas à aborder tous les détails de cette relation sans toutefois tomber dans la caricature. Il arrive à cerner une relation complexe où se révèlent les rapports de force entre un homme supérieur, dominant la femme banale qui le rend sexuellement dépendant.

Comme s’il fallait illustrer ce rapport de force de manière plus évidente, on découvre à travers cette enquête que Cécile, mariée à un homme indulgent, rêve de se faire épouser par Edouard. Celui-ci ne tient jamais ses promesses. Régulièrement elle menace de le quitter. Le banquier dur en affaires, passionné pour la chasse et les armes, est au fond, un être fragile et perturbé. De plus en plus accro à Cécile, il ne cède pourtant pas à ses exigence. Son tempérament avare prend le dessus. Ne pouvant pas obtenir le mariage, Cécile réclame de l’argent. Le banquier lui promet et lui donne un million de dollars qu’il s’empresse de lui reprendre. Dans ce contexte de chantages réciproques, le jeu sm se transforme en drame lorsque attaché, latexé, l’esclave aurait prononcé les mots qui lui seront fatals : «Un million de dollars, c’est cher pour une pute».

3 commentaires:

  1. Tristes amours, blessées une dernière fois par la vulgarité du verbe: cette combinaison de latex ne pouvait en contenir plus.

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  2. Il y a de ces "victimes" dont on pourrait être tenté de poser la question de leur "culpabilité".

    Si le terme est fort, ce type garde incontestablement une responsabilité dans son propre déboire.. Dans l'apparente maitrise qu'il avait sur l'avenir de sa relation...

    Quoi qu'il en soit, quand on travail dans la "haute" finance, on n'est jamais totalement "innocent" ^^

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  3. Vous avez dit "un être fragile et perturbé"
    certainement pas, c'est le cas ou la victime est sadique et manipulatrice absolument maître du jeu. Comme les masochistes savent l'être.

    La vraie victime, la vraie soumise, c'est elle.

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